La mobilité durable
« La pollution nous pompe l’air ! »
En août, un afterwork était organisé sur la rue de la Loi, à Bruxelles, pour interpeller les ministres sur la qualité de l’air. Pour rappel, l’Agence européenne de l’environnement (AEE) rapporte que la pollution de l’air est la première cause de mort prématurée en Europe.
De Sang Sang Wu
Mouvement citoyen né en 2016, Bruxsel’Air a participé au projet ExpAIR qui avait pour but de mesurer la qualité de l’air au moyen d’appareils portables. Depuis, le collectif mène des actions ludiques pour sensibiliser le grand public à ces enjeux. Pour Stefano Pironio, un des volontaires de Bruxsel’Air, il faut rompre avec la mentalité du « tout-à-la-voiture » : « 50% des ménages bruxellois ne possèdent pas de véhicule. En ville, nous n’en avons pas besoin. Pour les déplacements avec les enfants et pour faire les courses, j’utilise un vélo cargo. Parfois, j’emprunte le métro, le tram ou les trottinettes partagées. À Bruxelles, ce sont les mobilités à favoriser ». Il réclame plus d’espace pour les piétons et les cyclistes et prône des mesures fortes pour inciter les gens à opter pour des modes de déplacement doux : « L’insécurité est un gros frein. Il faut que cela devienne une priorité pour la police. On pourrait aussi s’inspirer de nos voisins qui ont des infrastructures géniales ».
Qui sont les organisateurs?
Critical Mass Brussels est composé de cyclistes qui occupent l’espace public dans l’espoir d’y voir moins de voitures. Le dernier vendredi du mois, des Masses Critiques sont organisées partout dans le monde pour promouvoir les déplacements à vélo dans la ville. D’après Chloé Van Driessche de Critical Mass Brussels, beaucoup de choses restent à faire pour parler de mobilité durable. « Un moyen de transport est durable quand il n’a pas d’impact sur la qualité de vie des gens. Mais il faut aussi tenir compte de sa durée de vie. Pour les trottinettes électriques, elle est de seulement 30 jours. Enfin, pensons à l’espace occupé : un véhicule garé prend la place de 7 vélos ! », tonne la cycliste. Rapide, bon pour la santé, économique : le vélo constituerait la meilleure alternative à la voiture. « À Bruxelles, les gens sont coincés 190 heures par an dans leur voiture, soit 8 jours. Nous voulons des mesures poussées du nouveau gouvernement pour encourager les gens à changer de comportement ».
Représentant les intérêts des cyclistes auprès des pouvoirs publics, le GRACQ se bat pour que rouler à vélo à Bruxelles et en Wallonie soit sûr et agréable. Julio Sanchez y travaille et lutte pour que le principe « STOP » soit appliqué systématiquement. Ainsi, une hiérarchisation entre les différents modes de déplacement est opérée. « La priorité est accordée aux piétons, puis aux cyclistes, ensuite aux transports publics et enfin, aux véhicules privés. Pour moi, la mobilité durable n’est pas de bannir la voiture, mais de réfléchir au moyen le plus adapté pour chaque déplacement ». Il milite pour que les modes doux bénéficient des mêmes moyens financiers que la voiture. « Le manque d’aménagements rebute les gens. Il faut attribuer plus d’espace public aux vélos et aux piétons. D’autre part, il y a les voitures de société : à partir du moment où cette possibilité est donnée, ils vont l’intégrer dans leur quotidien. Il faut permettre aux travailleurs d’accéder à d’autres mobilités. »
Mouvement urbain luttant pour une Bruxelles durable, le BRAL effectue un travail d’expertise et de lobbying. « Notre capitale devrait oser appliquer des mesures qui découragent les comportements non durables, comme l’usage systématique de la voiture. Je suis en faveur d’un péage zonal et d’une taxe au kilomètre. De plus, nous avons plus de parkings qu’à Paris ! Cette offre importante attire évidemment les voitures », affirme Marie Couteaux, collaboratrice en matière de mobilité. D’après elle, les modes doux sont durables car ils n’émettent pas de polluants affectant la qualité de l’air. « À Bruxelles, le problème est le morcellement de la décision. Il est compliqué de faire appliquer un règlement car les axes routiers traversent plusieurs communes et chaque échevin à son mot à dire, ce qui ralentit les choses. Et c’est pareil au niveau régional : la lenteur des accords inter-régionaux est un problème structurel propre à Bruxelles. Or, la mobilité se conçoit de façon transversale. »
Jeune bruxelloise de 25 ans, Estelle De Bruyn utilise le vélo lors de ses déplacements depuis plusieurs années. Elle a commencé lorsqu’elle a dû effectuer les trajets entre son domicile et l’université où elle a étudié. Depuis, elle ne le lâche plus. « Comme mon but est de me rendre d’un point A à un point B, le vélo est la manière la plus rapide d’y arriver. De plus, c’est un moyen de transport non polluant et peu cher », affirme-t-elle. Sans oublier le sentiment de liberté qu’il lui procure. « Pour moi, la mobilité durable est une mobilité qui a peu d’impact sur l’environnement et qui convient à l’utilisateur. Il faut distinguer ceux qui l’utilisent sans réfléchir de ceux qui en ont vraiment besoin. » Un des leviers importants serait de développer le réseau des transports en commun pour le rendre plus fiable et efficace. « J’ai des collègues qui viennent en voiture car ils ne savent jamais vraiment quand ils vont arriver au bureau. C’est un problème », regrette la jeune femme.