Wolfgang Becker savait que les punchlines font mouche lorsqu'elles visent les sentiments collectifs. En décember 2024, le réalisateur de « Good Bye, Lenin ! » est décédé à l'âge de 70 ans.
C'est un adieu féerique, qui se déroule presque sans bruit. Suspendu à un hélicoptère, le torse du monument à Lénine flotte dans le ciel de Berlin-Mitte. La main droite du révolutionnaire déchu est tendue vers l'avant en signe d'encouragement.Dans le film Good Bye, Lenin ! de Wolfgang Becker, une mère de famille est-allemande a raté la chute de la RDA parce qu'elle est restée dans le coma pendant des mois. Son fils lui fait croire qu'elle vit encore sous le régime socialiste. Pour qu'elle ne souffre pas tout de suite d’une autre crise cardiaque.
Mais la réalité se met toujours en travers de l'illusion. Cette tragicomédie avec Katrin Sass et Daniel Brühl est devenue un succès, le film allemand le plus populaire de l'année 2003 avec plus de six millions de spectateurs.trices. Il a été projeté dans 64 pays et a reçu le César français ainsi que le Goya espagnol, tous deux dans la catégorie « meilleur film européen ». Wolfgang Becker possédait le sens du timing et savait qu'une punchline [MP1] fait mouche lorsqu'elle vise les sentiments collectifs. Avec lui, une touche de Lubitsch est revenue dans le cinéma allemand. Le « Times » de Londres a qualifié Good Bye, Lenin ! de « film allemand le plus drôle depuis un siècle ».
Succès avec son film de fin d'études
Becker est né en 1954 à Hemer, une petite ville du nord du Sauerland. Avant d'entrer à la Deutsche Film- und Fernsehakademie de Berlin (DFFB), il avait étudié la philologie allemande, l'histoire et les études américaines à l'Université libre. Son sombre film de fin d'études, Schmetterlinge, avait déjà fait sensation au niveau international et avait été récompensé par un Student Academy Award, l'Oscar des étudiants.Wolfgang Becker a ensuite travaillé pour la télévision. En 1994, il fonde avec ses collègues réalisateurs Tom Tykwer et Dani Levy ainsi que le producteur Stefan Arndt la société de production X Filme, qui est devenue l'un des principaux centres de création du cinéma allemand, sur le modèle de United Artists.
Amoureux d'une musicienne de rue
Le titre du premier film de Becker, qu'il a tourné en 1997 pour X-Filme, devient un proverbe : La vie est un chantier (« Das Leben ist eine Baustelle »). Le drame suit un anti-héros, interprété par Jürgen Vogel, dérivant à travers Berlin de manière épisodique. Il perd son emploi dans une usine de viande, craint d'avoir été contaminé par le VIH chez sa petite amie et tombe finalement amoureux d'une musicienne de rue, interprétée par Christiane Paul.Becker était considéré comme un perfectionniste soucieux du détail. Il ne voulait pas faire de compromis artistiques. C'est ainsi qu'il a fallu attendre douze ans après son triomphe avec Good Bye, Lenin ! pour qu'il revienne au cinéma en 2015 avec Ich und Kaminski, à l'exception d'une contribution au film à épisodes Deutschland 09. Cette satire du monde de l'art est basée sur un roman de Daniel Kehlmann et met en scène Daniel Brühl en critique grandiloquent qui veut écrire un exposé sur un peintre âgé. Dernièrement, Becker a terminé son film Der Held vom Bahnhof Friedrichstraße sur un exode massif de Berlin-Est, d'après le livre de Maxim Leo.
« En l'absence de scénarios appropriés, je préfère attendre d'avoir en main un script qui me semble juste », a déclaré le réalisateur dans une interview. « J'essaie toujours de trouver des films que je peux défendre à cent pour cent ».
Jeudi 12 décembre 2024, Wolfgang Becker est décédé, des suites d'une maladie grave, mais tout de même surprenante, selon les informations. Il avait 70 ans et laisse derrière lui son épouse Susanne et sa fille Rike.
Décembre 2024