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Littérature jeunesse : nouveautés
Psychologie

Cinq nouveaux romans de littérature jeunesse abordent les difficultés de l’adolescence : après le bac ou sans père, plongés dans les univers numériques ou laissés-pour-compte en province ou encore juste après la Seconde Guerre mondiale. Des histoires parfois tristes, parfois pleines d’espoir.

De Holger Moos

Jäger: Die Nacht so groß wie wir © Rowohlt À ses débuts marqués par la parution de Nach vorn, nach Süden (En avant, vers le Sud), Sarah Jäger a obtenu en 2021 une bourse Kranichstein pour auteurs de littérature jeunesse. Dans son nouveau roman Die Nacht so groß wie wir (Une nuit aussi grande que nous), elle atteste à nouveau de son acuité dans l’observation de l’âme des jeunes gens. Il s’agit de la dernière nuit que passent ensemble cinq amis qui pensent se connaître parfaitement. Maja, Suse, Pavlow, Bo et Tolga forment une bande, ils viennent tout juste de fêter leur bac, mais la soirée est loin d’être terminée. La nuit se doit d’être inoubliable, mais elle dérape complètement. Des secrets plus ou moins importants, tenus sous silence pendant trop longtemps, se font jour. Avant de commencer leur vie d’adulte, ils doivent sonder leurs propres abîmes et ceux des autres. Die Nacht so groß wie wir a été nommé cette année pour le Prix allemand de la littérature pour la jeunesse, dans la catégorie Livres Jeunesse. Le jury argumente ainsi son choix : « Sans détours et à travers différents points de vue narratifs, Sarah Jäger emmène les lecteurs au plus près de son groupe de personnages empreint de fragilité. (…) Captivante dès le début, Sarah Jäger déploie un grand suspense au moyen d’intrigues imprévues. Avec des dialogues au rythme soutenu, un comique de situation et des jeux de mots, mais en ayant aussi parfois recours à un registre de langue plus mélancolique, elle nous fait prendre part à ce moment décisif du passage à l’âge adulte ».

Rabinowich: Dazwischen: Wir © Hanser Cinq années après que Julya Rabinowich avait fait raconter, dans son premier livre pour la jeunesse paru en 2016 Dazwischen: Ich (Moi : entre-deux), à Madina, une adolescente de 15 ans, sa difficile installation dans son nouveau pays, nous disposons désormais de la suite de l’histoire : Dazwischen: Wir (Nous : entre-deux). Madina a laissé derrière elle la guerre et ses horreurs ainsi que la dangereuse fuite du pays. Elle vit désormais depuis plus de deux ans avec sa famille dans une petite ville quelconque. L’appartement se trouve dans la maison de sa meilleure amie, mais son père a décidé de rentrer dans leur pays d’origine qui est toujours en guerre. Un vide dans la vie de Madina qui, elle, va rester. Elle n’a effectivement plus de contact avec son père. La mère est épuisée, dépressive, le petit frère a des problèmes à l’école. Pour beaucoup de choses, Madina doit se débrouiller. C’est elle qui apporte une solution aux problèmes et elle obtient différents types d’aide. Elle a cependant bien réussi sa nouvelle vie ; elle a même pu, en l’absence de son père autoritaire, obtenir quelques libertés. Mais par la suite apparaissent des inscriptions racistes et, tous les jeudis, un groupe scande sur la place principale : « Les étrangers, dehors ! ». Ils sont tout d’abord peu nombreux, mais le deviennent de plus en plus. Une épreuve de vérité, pas seulement pour Madina mais aussi pour tous ceux qui vivent ici. Pourtant, Madina décide de regarder les choses en face et trouve des alliés dans une situation qui devient menaçante. Cette histoire est racontée à travers les notes d’un journal intime et convainc par une langue simple et claire ainsi que par des images saisissantes. Sur Deutschland Kultur, Sylvia Schwab salue le roman et son autrice : « Parmi les livres jeunesse désormais nombreux sur l’immigration, le fait d’être étranger ou le racisme, les romans de Julya Rabinowich occupent une place particulière, avec leurs descriptions précises, à la fois pleines d’empathie et de provocation, d’une vie vécue dans un « entre-deux ».

SAUVER LE MONDE GRÂCE ÀUN JEU ?

Korn: Globalopoly © Jacoby & Stuart En référence au jeu de Monopoly, quatre adolescents de nationalités différentes développent, peu de temps après la pandémie mondiale, le jeu vidéo Globalopoly en guise d’alerte face aux dangers issus du capitalisme global et du changement climatique. Comprenant qu’ils ne pourront rien changer avec leur jeu, ils essaient d’agir dans la clandestinité. Ils remarquent très vite qu’on les observe et qu’on les surveille. La situation devient dangereuse et prend les allures d’une aventure. Wolfgang Korn raconte cette histoire avec tant de suspense et d’intelligence que l’Académie allemande pour la Littérature jeunesse a nommé, en février dernier, « Livre du mois pour le climat » ce premier roman jeunesse de Wolfgang Korn: « L’auteur mêle habilement des faits avérés à une intrigue captivante et des personnages crédibles. Un livre qui oblige à réfléchir ! »

Bronsky: Schallplattensommer  © dtv Dans son dernier roman jeunesse, Schallplattensommer (L’été du disque), Alina Bronsky raconte une histoire triangulaire d’amour et d’abandon. Maserati, 17 ans, (elle doit ce prénom original à sa mère qui se produisait comme chanteuse et fut la compagne d’hommes riches) vit dans un trou perdu, dans l’Est de l’Allemagne. Avec sa grand-mère, qui montre de premiers signes de démence, elle exploite un petit café-restaurant avec jardin. Dans le village, elle apparaît comme une marginale, « le seul individu de sexe féminin et de moins de 55 ans dans un périmètre de 13 kilomètres », et elle a une forte aversion pour les citadins qui viennent en excursion. Elle n’a ni Internet ni Smartphone, ne va plus à l’école et ne laisse personne s’approcher d’elle, à l’exception de sa grand-mère. Lorsqu’une famille aisée avec deux adolescents s’installe dans une vieille maison de maître, l’indépendance, mais aussi la vie retirée de Maserati se trouvent perturbées. Les deux garçons s’intéressent à elle. Et l’un d’entre eux s’approche dangereusement de son secret bien gardé.

Les romans d’Alina Bronsky se caractérisent par le talent d’observation et la narration concise de l’autrice : « Elle décrit, sans kitsch ni sentimentalisme, les conditions de vie difficiles de Maserati, la recherche de celle-ci qui veut trouver sa place dans le monde tout en souhaitant vivre cachée. La langue de Bronsky présente une discrète touche d’émotion », juge Katja Eßbach sur NDR Kultur.

BEAUCOUP DE SOUFFRANCE ET UNE LUEUR D’ESPOIR

Boie: Heul doch nicht, du lebst ja noch © Oetinger Trois adolescents à la fin de la guerre, en 1945, à Hambourg : Jakob dont la mère juive a été déportée lors de l’un des derniers transports vers Theresienstadt et qui, caché dans une maison bombardée, ne sait toujours pas que la guerre est terminée. Traute, la fille du boulanger, dont les amies sont mortes dans des bombardements ou ont disparu au gré des troubles causés par la guerre, qui veut juste jouer au foot dans la rue avec les garçons. Parmi eux, Hermann qui continue de porter l’uniforme des jeunesses hitlériennes et doit s’occuper de son père amputé d’une jambe. Ce dernier lui rend la vie difficile ainsi qu’à sa mère. Encore peu de temps auparavant, rien n’aurait réuni ces trois adolescents. Pourtant, leurs chemins se croisent pendant un bref moment. Et Jakob reconnaît que la guerre continue pour Hermann : « Dans la tête de Hermann, la guerre n’est pas encore vraiment terminée, ni la guerre, ni les années d’avant ; mais d’ailleurs, comment ce monde pourrait-il disparaître aussi rapidement ! Ce qui fut si longtemps vérité, ne devient pas mensonge du jour au lendemain. »

Dans Heul doch nicht, du lebst ja noch (Ne pleure pas, tu es encore en vie), Kirsten Boie raconte de manière très visuelle le quotidien de ces adolescents qui ont chacun des expériences de la guerre et des traumatismes très différents. Et elle ne prend pas parti. Son empathie ne va pas seulement à Jakob qui est persécuté, mais à l’ensemble des personnages : « Les Allemands qui n’ont pas été persécutés ont eux aussi terriblement souffert à la fin de la guerre » déclare Boie à la NDR. Et malgré la souffrance, on perçoit à la fin une lueur d’espoir.
 
Rosinenpicker © Goethe-Institut / Illustration: Tobias Schrank Kirsten Boie: Heul doch nicht, du lebst ja noch
Hamburg: Oetinger 2022. 192 p.
ISBN: 978-3-7512-0163-6
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Alina Bronsky: Schallplattensommer 
München: dtv, 2022. 192 p.
ISBN: 978-3-423-76370-7
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Sarah Jäger: Die Nacht so groß wie wir
Hamburg: Rowohlt, 2021. 192 p.
ISBN: 978-3-499-00574-9

Wolfgang Korn: Globalopoly. Keiner wird gewinnen
Berlin: Jacoby & Stuart 2021. 382 p.
ISBN: 978-3-96428-116-6

Julya Rabinowich: Dazwischen: Wir
München: Hanser 2022. 256 S.
ISBN: 978-3-446-27236-1
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