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Énergies alternatives
S'éloigner du pétrole

Une installation pour la production d'algues, composée d'une série de tubes
Les plantules d’algue sont cultivées artificiellement dans des fermes. Les algues permettent de produire une biomasse durable qui peut, dans certains cas, remplacer le pétrole. | Photo (détail) : Hilda Weges © picture alliance / Zoonar

Face au réchauffement climatique, l'ère du pétrole touche à sa fin. Les États et même les compagnies pétrolières le reconnaissent. La communauté mondiale doit désormais remplacer le pétrole par des sources d’énergie alternatives qui ne libèrent pas de gaz à effet de serre. Comment y parvenir ?

De Dr. Frank Frick

Le Groenland a annoncé en été 2021 l'abandon de la recherche de pétrole sur son territoire, bien que les géologues soupçonnent l'existence d'énormes gisements non découverts dans l'Arctique. Le gouvernement de cette région autonome danoise a justifié cet arrêt non seulement par les conséquences négatives de l'exploration sur la nature, le tourisme et la pêche, mais aussi, de manière surprenante, par des analyses économiques. Selon ces analyses, l'exploitation du pétrole dans l'Arctique n'est pas très rentable.

Aujourd'hui, même les compagnies pétrolières estiment que l'époque de cette industrie est révolue. En tant que source d'énergie contenant du carbone, le pétrole libère du dioxyde de carbone (CO2), un gaz à effet de serre lorsqu'il est brûlé - et les États ayant signé l'accord de Paris sur le climat veulent éviter un réchauffement de la planète de plus de deux degrés Celsius. Par exemple, le groupe pétrolier BP a annoncé l'année dernière un changement de stratégie pour devenir « une entreprise énergétique d'un tout autre type d'ici 2030 ». Ce faisant, BP soutient, comme l'a écrit le président du conseil d'administration Bernard Looney, que les marchés de l'énergie se tourneront vers les énergies renouvelables et d'autres formes d'énergie sans carbone ou à faible teneur en carbone. Mais quelles formes d'énergie respectueuses du climat peuvent remplacer le pétrole ?

Il faut savoir à ce sujet que près des deux tiers du pétrole consommé dans le monde - transformé en diesel, essence ou kérosène - sont utilisés pour le transport routier, maritime, ferroviaire et aérien. C'est ce qu'a déterminé l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

De Lélectricité verte pour les transports

La façon la plus évidente de s'éloigner des moteurs à combustion classiques est de les remplacer par des moteurs électriques. En juillet 2021, l'Allemagne comptait déjà quelque 440 000 voitures électriques à batterie, sur un parc total de plus de 48 millions de voitures. En ce qui concerne la question de savoir à quel point l'électromobilité est respectueuse du climat, le ministère allemand de l'Environnement écrit : « Les voitures électriques sont aussi propres que l'électricité avec laquelle elles roulent ». Si de plus en plus de personnes achètent des voitures électriques, le climat n'en profitera que si un nombre suffisant d'installations éoliennes et photovoltaïques sont construites pour produire de l'électricité « verte ». En outre, la fabrication des batteries doit être respectueuse de l'environnement.

L'électricité verte peut aussi être utilisée autrement : elle permet de produire de l'hydrogène « vert » à partir de l'eau dans de grandes installations. L'hydrogène peut ensuite servir de carburant dans les voitures électriques équipées de piles à combustible. Les piles à combustible convertissent à nouveau l'énergie chimique de l'hydrogène en énergie électrique. Le principal avantage des voitures à pile à combustible par rapport aux voitures électriques à batterie est leur plus grande autonomie : les véhicules produits en série peuvent parcourir jusqu'à 600 kilomètres sans faire le plein. L'un des points négatifs est qu’il faut une infrastructure propre avec des stations-service et des pipelines d’hydrogène.

Le dioxide de carbone: un nouveau type de pétrole 

Il est possible d'améliorer le bilan carbone des véhicules équipés de moteurs à combustion : le dioxyde de carbone libéré par les moteurs est extrait au préalable de l’atmosphère, du moins en partie. Pour ce faire, il existe de deux façons. Soit il est absorbé par des algues ou des herbes à croissance rapide. L'industrie peut ensuite transformer la biomasse résultante, grâce à l’électricité verte, en carburants similaires à l'essence ou au diesel. Soit l’industrie utilise de l’hydrogène pour transformer le CO2 des gaz d'échappement en ce qu'on appelle le gaz de synthèse, qui est ensuite utilisé pour produire du carburant synthétique, et ce en utilisant de l'électricité verte. Selon le produit final, les spécialistes parlent de « Power-to-Gas », « Power-to-Fuel » ou plus généralement de « Power-to-X ». Bien qu’il existe des installations de démonstration, le Power-to-X n'est pas encore implanté à grande échelle.

« Les moteurs qui fonctionnent à l'hydrogène ou, en particulier, aux carburants synthétiques qui en sont issus, présentent des besoins énergétiques accrus par rapport aux moteurs électriques à batterie. Ainsi, une voiture équipée d'un moteur à combustion a besoin de cinq à six fois plus d'énergie sous forme d'électricité renouvelable qu'un véhicule électrique à batterie pour parcourir la même distance », selon le conseil allemand des experts en environnement. Il croit donc que l'avenir de l'hydrogène et des carburants synthétiques dans les transports se situe ailleurs, soit dans l'aviation et la navigation internationale. Car dans ce domaine, « les batteries ne sont pas une solution en raison de la faible densité énergétique des accumulateurs électrochimiques ».

Réduire les besoins en chauffage

Comparé au secteur des transports, renoncer au pétrole pour chauffer les bâtiments semble être un problème mineur. Selon l'AIE, environ cinq pour cent du pétrole consommé dans le monde est utilisé pour le chauffage de bâtiments. Les besoins futurs en chauffage peuvent être fortement réduits par une isolation thermique des surfaces extérieures. Les pompes à chaleur, qui utilisent de l'électricité verte pour extraire l'énergie de l'air, de l'eau ou du sol, pourraient alors fournir la chaleur nécessaire.

Selon les statistiques de l'AIE, environ 17 pour cent de la consommation mondiale de pétrole est due à une « utilisation non énergétique ». Un chiffre étonnamment bas si l'on considère que le pétrole est une matière première universelle utilisée entre autres pour la fabrication de médicaments, de matières plastiques, de vernis et de peintures, de produits phytosanitaires, de cosmétiques et de détergents. L'électricité ne peut pas remplacer le pétrole à cet égard, car elle ne contient pas d’atomes. Elle n’est que le mouvement de porteurs de charge dans une certaine direction.

La Biomasse pour remplacer le pétrole

Il existe deux importantes solutions de rechange au pétrole, basées sur des substances respectueuses du climat. L'une est le CO2, qui fournit, à partir des gaz d'échappement ou de l'air, les atomes de carbone à partir desquels l'industrie fabrique des produits chimiques de base, puis des produits chimiques finaux, par le biais de la technologie Power to X. L'autre est la biomasse. Le plus grand problème est que la biomasse est composée de substances plus complexes que le pétrole. Pour remplacer le pétrole par la biomasse, l'industrie chimique devrait complètement transformer le processus de fabrication des plastiques, des cosmétiques et autres, qu'elle a optimisé pendant de nombreuses décennies. Les nouveaux processus sont encore énergivores et coûteux. Mais des milliers de chercheur.es dans le monde entier travaillent ardemment pour y remédier.